Instant Yoga (I.Y.): Quels ont été tes premiers contacts avec le yoga ? Marina Margherita (M.M.): Pourquoi être allée vers le yoga ? J’y suis allée en me laissant porter. A l’époque, je vivais au Canada, un pays connu autant pour la beauté de sa nature que pour la rigueur de ses hivers. Je suis une fille du Sud, habituée à vivre dehors la plupart de l’année. Nouvellement arrivée, avec un enfant de quelques mois, un mari qui s’absentait pour des longues périodes, je pouvais rester pendant plusieurs semaines à l’intérieur bloquée par la neige, sans parler à personne. J’ai rencontré un médecin traitant, soignant l’âme et le corps, qui, constatant que j’étais plus dans la survie que dans la vie, m’a proposé de pratiquer le yoga. Ce qui a été porteur pour moi dans sa formulation, c’est qu’il présentait le yoga comme une « discipline de vie ». Je me suis tournée vers une association, le YWCA, où j’ai rencontré un professeur, une élève de Iyengar qui faisait faire la posture sur la tête. Au départ j’ai été attirée, comme plusieurs, par le côté « extraordinaire » du yoga qui paraissait chambouler tous les repères habituels. En réalité j’avais senti qu’un espace s’ouvrait pour moi, avec du souffle. I.Y. : Quelle a été ta motivation pour voyager en Inde ? M.M. : La 1ère fois, un professeur indien m’a donné l’envie d’aller voir dans les ashrams. Je suis partie à l’aventure, seule pendant un mois, avec un petit sac de voyage, et suis arrivée dans l’ashram d’Osho (Bhagwan Shree Rajneesh) à Pune…dont je suis repartie au bout de deux jours. I.Y. : Pourquoi avoir choisi l’Ecole de Madras ? M.M. : Aux Assises du Yoga, j’ai assisté à un cours guidé par un professeur venant de Madras, qui avait suivi un stage avec T.K.V. DESIKACHAR, fils et élève de KRISHNAMACHARYA. Ce dernier, un grand maître du Sud de l’Inde, qui commença à transmettre le yoga à Mysore dans les années 1920, est à l’origine d’un enseignement adapté à la personne, à ses besoins et surtout à son contexte culturel. A la fin du cours, ce jeune professeur a demandé : « qu’en pensez-vous ? ». I.Y. : Comment s’est faite la transition de la pratique personnelle à l’enseignement ? M.M. : A nouveau, j’ai plutôt l’impression d’avoir été « choisie », que de choisir et que le yoga m’a « portée ». Mon professeur indien d’Abu Dhabi m’a demandé d’enseigner, en anglais, et les premiers cours étaient donnés dans une chapelle, avec une belle atmosphère. I.Y. : Quels pas t’ont amenée de l’enseignement à la formation de professeurs ? M.M. : J’ai d’abord donné des cours, puis des cours d’approfondissement, avec des ateliers d’étude des postures, des Yoga-Sutra. I.Y. : Peux-tu nous parler de la fondation du C.R.Y.P. (Centre de Recherche sur le Yoga et la Pédagogie) que tu as créé ? M.M. : Je souhaitais un nom qui reflète ce qui était important pour moi dans une formation, avec deux pistes : la recherche en groupe, et la pédagogie. Ce dernier terme vient du grec « païda-gogya ». Païs, païdos, (enfant) et gogya (le fait de conduire). Mon interprétation de ce mot se réfère à l’art de la maïeutique cher à Socrate, qui veut dire « faire accoucher l’élève de lui-même. I.Y. : Quels sont tes bonheurs et apprentissages, dans cet engagement au service du Yoga ? M.M. : les bonheurs : quand j’enseigne le yoga, je me sens à ma place, dans mon « SVA-DHARMA » en contact avec moi-même et en harmonie avec un ordre intérieur qui est le mien et qui me porte. |